Manu Dibango, l’homme-souffle

HOMMAGE. Il y a trois ans disparaissait le grand saxophoniste camerounais. Retour sur le texte que lui avait consacré l’écrivain Eugène Ébodé.
Je viens d'apprendre la mort de Manu Dibango, ce long, longiligne et vibrant humainDont le prolongement naturel était le saxophone. C'était son stylo à lui, son micro, son crayon, son transistor en forme de « S » incliné qui lui a servi de porte-voix, de porte-son, de porte-plume, de ventre fécond, de porte ouverte au meilleur des langages parmi les humains dont il se disait le concierge. Je me souviens de sa présence, de notre première rencontre à l'initiative de Jean-Noël Schifano, grâce aux éditions Gallimard, lors d'une mémorable soirée de Continents Noirs organisée à la Maison de l'Amérique latine à Paris. C'était en 2002, je crois, et Manu Dibango nous a réjouis et émerveillés. Sa jovialité naturelle, son rire sonore et de contralto, son sourire bienveillant, sa faculté à illuminer et à se fondre avec les autres l'avait déjà établi, de Douala à Lagos, d'Abidjan à Bamako, de Johannesburg à Alger, de Naples à Tokyo, de Paris à Pékin, de Bombay à New York, frère aîné, oncle, père, grand-père inoxydable et aimé.